2021 | Bourses de la Ville de Genève
Exhibition text for Yvan Alvarez’s installation in the exhibition Bourses de la Ville de Genève 2021 at Centre d’art contemporain Genève.
“La pratique d’Yvan Alvarez, aujourd’hui principalement installative, opère souvent conceptuellement à la manière de la photographie. Elle procède par cadrage, par l’extraction d’éléments de la réalité pour les figer et les insérer dans la salle d’exposition, parfois intacts, parfois morcelés ou reconstruits, parfois dissimulés. Ils sont autant de reliquats, charriés jusqu’à l’espace d’art avec une économie de moyens délibérée et une précision rigoureuse. Plutôt que des ready-made, ces images et objets agissent comme des déflecteurs, attirant notre attention sur le hors-cadre, sur la part manquante. Leur sens se déploie dans ces interstices, ces espaces suspendus et presque indéfinis dont émergent des récits fragmentaires, au décryptage semé d’embûches parfois littérales.
Objets et images y disposent d’une autonomie restreinte. Issus fréquemment de l’histoire et des expériences de l’artiste, ils incarnent aussi un certain échec à transmettre quelque chose de son vécu, et une résignation à cette défaite. Plutôt que de porter notre attention sur ces récits intimes, ils l’attirent sur ces limites, sur les points de rupture de cette transmission. Mais en retour, ils proposent aussi une expérience nouvelle, engendrée par les tensions presque performatives entre ce qui est donné et ce qui est retenu. Si elles adoptent une stratégie de repli, et expriment une forme de désenchantement, les œuvres d’Yvan Alvarez contiennent aussi une part latente, et avec elle la possibilité, distante soit-elle, d’une résolution, d’une reconnexion. Qu’il s’agisse d’images abstraites se développant ou se dégradant lentement, de boîtes en carton ou de couvertures dissimulant des objets au regard, ou d’objets du quotidien rechoréographiés dans l’espace d’exposition, elles jouent de ce possible toujours présent, tout en nous abandonnant à leur indéchiffrabilité, à notre impuissance en tant que spectateur à provoquer ce dénouement.”